Ce vendredi 14 mars, à la veille de la Journée mondiale des droits des consommateurs, la Confédération Nationale du Logement (CNL) a organisé un forum sur l’alimentation saine et abordable à la mairie du 18ème arrondissement de Paris. L’événement a rassemblé élus, chercheurs, militants et associations pour échanger autour de la Sécurité sociale de l’alimentation (SSA), un projet visant à garantir un accès universel à une nourriture de qualité tout en soutenant une production durable et éthique.
Reprendre la main sur l’alimentation collective
Dès l’ouverture du forum, Gérald Briant, adjoint au maire du 18ème arrondissement de Paris, a mis en avant les bénéfices de la remunicipalisation des cantines scolaires. «Reprendre la gestion publique des cantines, c’est nous redonner la possibilité d’agir sur la qualité de l’alimentation servie aux enfants, mais aussi sur les conditions de travail du personnel», a-t-il expliqué. Il a également souligné les avancées réalisées : «Nous avons pu mieux rémunérer les agents et proposer une alternative végétarienne quotidienne. C’est une réponse concrète aux enjeux de transition alimentaire et de justice sociale.?»
Nathan Guillemot, représentant de l’Union étudiante, a dénoncé de son côté la pression économique qui pèse sur les restaurants universitaires. «En poussant les CROUS à s’auto-financer, on les contraint à entrer dans une logique de rentabilité, ce qui va à l’encontre de l’objectif initial : garantir une alimentation de qualité à bas coût aux étudiants. L’alimentation ne doit pas être soumise aux règles du marché», a-t-il insisté.
Une expérimentation concrète pour la Sécurité sociale de l’alimentation
L’un des moments forts du forum a été la présentation d’une expérimentation menée en Haute-Savoie. Jocelyne Herbinski, représentante de la CNL dans ce département, a détaillé le projet pilote mené avec la CAF, la MSA, des producteurs locaux et des associations. «Nous testons depuis un an un dispositif qui accorde une aide alimentaire de 90 euros par mois aux familles avec deux enfants, ajustée selon leur quotient familial. L’objectif est de garantir un droit à une alimentation de qualité et de soutenir les circuits courts», a-t-elle expliqué.
Cette initiative illustre concrètement le principe de la Sécurité sociale de l’alimentation, qui repose sur une cotisation collective permettant de financer un accès universel à une alimentation choisie, et non subie. Amédée Félix, bénévole à La Marmite Rouge, a insisté sur l’aspect solidaire du dispositif : «C’est un modèle où chacun contribue selon ses moyens et où chacun reçoit selon ses besoins. Il s’agit de sortir de la logique de l’aide alimentaire caritative pour aller vers un véritable droit à bien se nourrir.»
Un combat historique pour la CNL
Lors de la seconde table ronde, Oualid Akkari, secrétaire confédéral de la CNL et président de la CNL75, a rappelé que la question de la consommation accessible et de la lutte contre la vie chère était au cœur des combats historiques de la Confédération. «La CNL milite depuis toujours pour que chacun ait accès à une alimentation saine et abordable. Nous nous battons contre la hausse des prix, pour un encadrement des marges de la grande distribution et pour la création d’un véritable service public de l’alimentation», a-t-il affirmé.
Bénédicte Bonzi, chercheuse et anthropologue, a renforcé cette perspective en insistant sur la dimension politique et révolutionnaire du projet de Sécurité sociale de l’alimentation. «C’est une réforme de rupture, qui pose une question essentielle : voulons-nous que l’alimentation soit un droit garanti collectivement, au même titre que la santé ou l’éducation, ou devons-nous la laisser aux mains des logiques marchandes»
Un enjeu de droit fondamental
Au-delà des aspects économiques et sociaux, le forum a également mis en avant la nécessité de reconnaître l’alimentation comme un droit constitutionnel. La sénatrice écologiste Raymonde Poncet a rappelé que l’expérimentation de la Sécurité sociale de l’alimentation avait été portée sous forme de proposition de loi par le groupe écologiste et social au Sénat. «Ce texte reviendra dans le débat politique car la question de l’accès à une alimentation de qualité devient une urgence sociale?», a-t-elle assuré.
Enfin, Eddie Jacquemart, président de la CNL, a conclu cette journée en rappelant l’ampleur du défi. «Aujourd’hui, 12 % de la population est en situation de précarité alimentaire. Ce n’est pas tolérable. L’alimentation ne peut pas être une variable d’ajustement économique. La CNL est et restera mobilisée pour défendre les droits des habitants, qu’il s’agisse du logement ou de l’accès à des biens de première nécessité comme l’alimentation. Nous devons faire de la Sécurité sociale de l’alimentation une réalité pour toutes et tous.»
Par ce forum, la CNL a une nouvelle fois affirmé son engagement dans le combat pour une alimentation accessible et de qualité. Alors que les inégalités alimentaires ne cessent de se creuser, la question de la Sécurité sociale de l’alimentation s’impose comme une réponse nécessaire aux défis sociaux et environnementaux d’aujourd’hui.
JULIEN SUERES